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LE VAGABOND

des fagots, garda des chèvres sur une montagne, tout cela moyennant quelques sous, car il n’obtenait, de temps en temps, deux ou trois jours de travail qu’en se proposant à vil prix, pour tenter l’avarice des patrons et des paysans.

Et maintenant, depuis une semaine, il ne trouvait plus rien, il n’avait plus rien et il mangeait un peu de pain, grâce à la charité des femmes qu’il implorait sur le seuil des portes, en passant le long des routes.

Le soir tombait, Jacques Randel harassé, les jambes brisées, le ventre vide, l’âme en détresse, marchait nu-pieds sur l’herbe au bord du chemin, car il ménageait sa dernière paire de souliers, l’autre n’existant plus depuis longtemps déjà. C’était un samedi, vers la fin de l’automne. Les nuages gris roulaient dans le ciel, lourds et rapides, sous les poussées du vent qui sifflait dans les arbres. On sentait qu’il pleuvrait bientôt. La campagne était déserte, à cette tombée de jour, la veille d’un dimanche. De place en place, dans les champs, s’élevaient, pareilles à des champignons jaunes, monstrueux, des meules de paille égrenées ; et les terres semblaient nues, étant ensemencées déjà pour l’autre année.

Randel avait faim, une faim de bête, une de ces faims qui jettent les loups sur les hommes. Exténué, il allongeait les jambes pour faire moins de pas, et, la tête pesante, le sang bourdonnant