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l’ouvrière, à qui je contai la fable d’une voiture emportée qui l’avait renversée et estropiée devant ma porte.

On me crut, et la gendarmerie chercha en vain, pendant un mois, l’auteur de cet accident.

Voilà ! Et je dis que cette femme fut une héroïne, de la race de celles qui accomplissent les plus belles actions historiques.

Ce fut là son seul amour. Elle est morte vierge. C’est une martyre, une grande âme, une Dévouée sublime ! Et si je ne l’admirais pas absolument je ne vous aurais pas conté cette histoire, que je n’ai jamais voulu dire à personne pendant sa vie, vous comprenez pourquoi.

Le médecin s’était tu. Maman pleurait. Papa prononça quelques mots que je ne saisis pas bien ; puis ils s’en allèrent.

Et je restai à genoux sur ma bergère, sanglotant, pendant que j’entendais un bruit étrange de pas lourds et de heurts dans l’escalier.

On emportait le corps de Clochette.


Clochette a paru dans le Gil-Blas du mardi 21 décembre 1886.