Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/16

Cette page n’a pas encore été corrigée

tants d’une étoile, ni les habitants d’une goutte d’eau… avec nos oreilles qui nous trompent, car elles nous transmettent les vibrations de l’air en notes sonores. Elles sont des fées qui font ce miracle de changer en bruit ce mouvement et par cette métamorphose donnent naissance à la musique, qui rend chantante l’agitation muette de la nature… avec notre odorat, plus faible que celui du chien… avec notre goût, qui peut à peine discerner l’âge d’un vin !

Ah ! si nous avions d’autres organes qui accompliraient en notre faveur d’autres miracles, que de choses nous pourrions découvrir encore autour de nous !

16 mai. — Je suis malade, décidément ! Je me portais si bien le mois dernier ! J’ai la fièvre, une fièvre atroce, ou plutôt un énervement fiévreux, qui rend mon âme aussi souffrante que mon corps. J’ai sans cesse cette sensation affreuse d’un danger menaçant, cette appréhension d’un malheur qui vient ou de la mort qui approche, ce pressentiment qui est sans doute l’atteinte d’un mal encore inconnu, germant dans le sang et dans la chair.

18 mai. — Je viens d’aller consulter mon médecin, car je ne pouvais plus dormir. Il m’a trouvé le pouls rapide, l’œil dilaté, les