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jetaient en moi un trouble étrange, puissant, nouveau, ces yeux peints, qui avaient vécu, ou qui vivaient encore, peut-être. Oh ! quel charme infini et amollissant comme une brise qui passe, séduisant comme un ciel mourant de crépuscule lilas, rose et bleu, et un peu mélancolique comme la nuit qui vient derrière, sortait de ce cadre sombre et de ces yeux impénétrables ! Ces yeux, ces yeux créés par quelques coups de pinceau, cachaient en eux le mystère de ce qui semble être et n’existe pas, de ce qui peut apparaître en un regard de femme, de ce qui fait germer l’amour en nous.

La porte s’ouvrit. M. Milial entrait. Il s’excusa d’être en retard. Je m’excusai d’être en avance. Puis je lui dis :

— Est-il indiscret de vous demander quelle est cette femme ?

Il répondit :

— C’est ma mère, morte toute jeune.

Et je compris alors d’où venait l’inexplicable séduction de cet homme !