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de son allure si naturelle, mais jamais portrait de femme ne me parut être chez lui autant que celui-là, dans ce logis. Presque tous ceux que je connais sont en représentation, soit que la dame ait des vêtements d’apparat, une coiffure seyante, un air de bien savoir qu’elle pose devant le peintre d’abord, et ensuite devant tous ceux qui la regarderont, soit qu’elle ait pris une attitude abandonnée dans un négligé bien choisi.

Les unes sont debout, majestueuses, en pleine beauté, avec un air de hauteur qu’elles n’ont pas dû garder longtemps dans l’ordinaire de la vie. D’autres minaudent, dans l’immobilité de la toile ; et toutes ont un rien, une fleur ou un bijou, un pli de robe ou de lèvre qu’on sent posé par le peintre, pour l’effet. Qu’elles portent un chapeau, une dentelle sur la tête, ou leurs cheveux seulement, on devine en elles quelque chose qui n’est point tout à fait naturel. Quoi ? On l’ignore, puisqu’on ne les a pas connues, mais on le sent. Elles semblent en visite quelque part, chez des gens à qui elles veulent plaire, à qui elles veulent se montrer avec tout leur avantage ; et elles ont étudié leur attitude, tantôt modeste, tantôt hautaine.