Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/199

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« la bande à Walter » et on les enviait parce qu’ils devaient gagner de l’argent avec lui et par lui.

Forestier, rédacteur politique, n’était que l’homme de paille de ces hommes d’affaires, l’exécuteur des intentions suggérées par eux. Ils lui soufflaient ses articles de fond qu’il allait toujours écrire chez lui « pour être tranquille », disait-il.

Mais, afin de donner au journal une allure littéraire et parisienne, on y avait attaché deux écrivains célèbres en des genres différents, Jacques Rival, chroniqueur d’actualité, et Norbert de Varenne, poète et chroniqueur fantaisiste, ou plutôt conteur, suivant la nouvelle école.

Puis on s’était procuré, à bas prix, des critiques d’art, de peinture, de musique, de théâtre, un rédacteur criminaliste et un rédacteur hippique, parmi la grande tribu mercenaire des écrivains à tout faire. Deux femmes du monde, « Domino rose » et « Patte blanche », envoyaient des variétés mondaines, traitaient les questions de mode, de vie élégante, d’étiquette, de savoir-vivre, et commettaient des indiscrétions sur les grandes dames.

Et la Vie Française « naviguait sur les fonds et bas-fonds », manœuvrée par toutes ces mains différentes.