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I

La pendule sonna six heures et la comtesse de Brémontal, quittant des yeux le livre qu’elle lisait, les leva vers le cadran d’un beau cartel Louis XVI accroché sur le mur ; puis, d’un lent regard, elle parcourut son grand salon sombre malgré les quatre lampes, deux sur la table, où beaucoup de livres traînaient, et deux sur la cheminée. Un feu de bûches, flambant dans l’âtre, un feu de campagne, un feu de château, jetait aussi une lueur à éclats sur les murs, éclairant des tapisseries à personnages, des cadres dorés, des portraits de famille et les hauts rideaux, d’un rouge foncé, qui voilaient et drapaient les fenêtres. Malgré toutes ces lumières, la vaste pièce était triste, un peu froide, pénétrée par l’hiver. On sentait du dehors l’âpre rigueur de l’air et le souffle du vent, glacé par le tapis de neige étendu sur la terre, qui faisait craquer les arbres du parc.

La comtesse se leva ; de sa démarche un peu lente, un peu traînante de jeune femme enceinte, elle vint s’asseoir devant le foyer et tendit ses pieds à la flamme. Les bûches embrasées lui jetèrent à la face l’émanation de leur vive chaleur, une sorte de caresse brû-