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Or il vivait depuis deux ans dans le contact incessant de cette chair caressante, et la nostalgie des habitudes prises, des baisers préférés, qu'il ne parvenait point à oublier ni à remplacer par d'autres, lui fit pendant trois mois des nuits troublées et des jours inquiets.

Elle lui écrivit: il ne répondit pas. Une seconde lettre l'agita. Elle s'accusait, tout en plaidant les circonstances atténuantes, et lui demandait en grâce de venir la voir seulement comme ami, de temps en temps.

Il résista pendant six semaines et se rendit à ses prières. Quelques jours plus tard, ils vivaient ensemble de nouveau.

Cela dura encore un an, puis il reçut la visite d'une vieille marchande à la toilette qu'il avait secourue plusieurs fois sur les instances d'Henriette. Les deux femmes s'étaient brouillées, et la vieille entremetteuse venait simplement révéler, par vengeance, qu'elle avait prêté sa maison aux rendez-vous de sa jeune cliente.

Alors il se fâcha tout à fait, tellement exaspéré qu'il se sentait guéri comme si on eût cicatrisé son coeur.

Il prit la résolution de n'avoir plus avec les femmes que des rencontres de maître qui paie et que rien n'agite et il quitta Paris pour changer d'air et de vie.

Aix attira sa pensée parce qu'il devait y retrouver son ami le comte de Lucette, et, l'ayant rejoint, il lui conta aussitôt toute cette pénible histoire que l'autre, d'ailleurs, connaissait déjà presque entièrement, par fragments. Il l'écouta cependant jusqu'au bout avec une attention narquoise, puis, regardant Mariolle dans les yeux:

- Dans combien de temps la reprendras-tu? dit-il.