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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

inouïe se produisit : une femme, Mme Sonia Morozova, entre au palais de Tauride en criant : « J’amène l’armée ! » Le régiment de Volhynski, compté parmi les plus fidèles, se rangeait devant la grille de la Douma…

Aussitôt tout change ! Les députés qui allaient partir se ravisent, l’enthousiasme un instant ralenti se ravive…

Voici ce qui s’était passé. Le régiment de Volhynski ayant pris des armes et forcé les portes de sa caserne était sorti dans la rue, sans but bien précis. Il rencontra des détachements des Préobrajensky qui se joignirent à lui. Quelqu’un proposa d’aller libérer les prisonniers de la rue de Tauride. Beaucoup s’y rendirent. Les autres se consultaient, indécis. Sonia Morozova vit ces hommes, eut la prescience rapide du rôle qu’elle pouvait jouer parmi eux et les entraîna en criant : « À la Douma ! » Ils y arrivèrent sans rencontrer d’opposition[1].

  1. J’ai connu, depuis, intimement, Mme Sonia Morozova. C’est une femme instruite, distinguée, mais d’une grande simplicité de manières et d’une exquise modestie. Peu avide de réclame elle est rentrée dans l’ombre après sa belle initiative à laquelle on n’a pas donné le retentissement qu’elle méritait.