nous rencontrons avec les Autrichiens et nous causons en buvant le thé.
— On ne tire donc plus là-bas ?
— Mais si ! tous les jours. Comment ne pas tirer lorsqu’on est deux armées, face à face ?
— Alors, pendant la journée vous vous tuez de part et d’autre une dizaine d’hommes, puis, le soir, vous vous embrassez et vous buvez le thé ?
— Des hommes ? Non, non, nous n’en tuons pas ! Nous tirons contre une montagne, les Autrichiens contre une autre, et, le soir, on boit le thé ensemble… Mais comment ne pas tirer quand on est là pour ça ?
Une sœur de charité sort de chez moi. Elle arrive des environs de Cernowicz.
— Eh bien ! lui ai-je demandé, que se passe-t-il dans ce secteur que j’ai vu jadis si actif ?
— Comme ailleurs, on déserte, on fraternise. il y a quelques jours, j’ai demandé à un soldat : « Est-ce vrai que, toi aussi, tu veux retourner au village ? — Pourquoi ne pas y retourner puisqu’on ne se battra plus ? — Mais il faut se battre, sans quoi les Allemands prendront toutes nos terres. — Oh ! pas les nôtres, elles sont trop loin : je suis du gou-