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LA RÉVOLUTION RUSSE

terres. Se faire tuer, c’est perdre sa part ! Alors, la nuit, en tapinois, on sort de sa tranchée pour se reporter un peu à l’arrière, de crainte d’une surprise. Au matin, si la tranchée est libre, on la réoccupe, tranquillement.

Les Allemands ont habilement profité de cet état d’esprit. Après leur attaque sur le Stokhod, ils ont compris que mieux valait laisser les Russes en paix. La Pravda et le Diélo Naroda travaillaient pour eux. Aussitôt les désertions ont commencé. Pendant quelques semaines les trains revenaient chaque jour bondés de soldats qui s’en retournaient au village. Les toits des wagons s’effondraient sous le poids de ceux qui n’avaient pu trouver place à l’intérieur. Des hommes ont été tués ou projetés sur la voie au passage des ponts. À l’heure actuelle, la moyenne des soldats présents sur le front varie entre 2 et 30 p. 100 !… Le nombre des déserteurs s’élève à plusieurs millions.

Puis les fraternisations sont venues. Après l’Appel à tous les socialistes, les soldats russes ont cru à la pacification universelle. Et, certes, ils ne demandaient qu’à y croire ! Ils étaient las de la guerre, las comme des enfants aux-