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LA RÉVOLUTION RUSSE

cédents seuls suffiraient à justifier la mesure prise contre lui. Commandant du rayon militaire de V…, le général s’y fit la réputation d’un terrible justicier. Il pendait les gens comme à plaisir et s’était fait, une règle de ne jamais signer une grâce ni une commutation de peine. On s’attendait à de la résistance ; aussi décida-t-on de faire un choix parmi les plus forts. Je fus désigné, avec l’adjoint, deux autres miliciens et huit soldats.

« Arrivés à la maison indiquée, nous plaçons un soldat en sentinelle à chaque porte. Ordre de ne laisser entrer ni sortir personne. Nous entrons dans la cour, revolver au poing. Le dvornik, stupéfait de voir un canon de revolver à deux pouces de son visage, se lève d’un bond, le dos arqué, les bras collés au corps et tremblant de peur. J’avais un peu envie de rire… Mais il faut soutenir la dignité de son rôle : ce n’est, pas un acte d’opérette que nous jouons. Nous montons à l’appartement suspect. Le dvornik nous suit. La maîtresse de maison est absente. La bonne n’a pas les clés. Une seconde d’hésitation, puis nous faisons sauter les serrures des armoires, nous retournons les lits, nous vidons les