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LA RÉVOLUTION RUSSE

s’écoula dans le plus grand calme. Lorsque la Révolution éclata, le gouvernement ne l’attendait plus.

Malheureusement, l’Empereur s’était solidarisé avec son ministre. Il a été la victime de son aveuglement. Lorsqu’on se reporte par la pensée à l’accueil enthousiaste que lui fit la Douma, le 12/25 février 1916, on se dit qu’il eût fallu bien peu pour qu’il fût adoré. Les avertissements non plus ne lui ont pas manqué. M. Rodzianko, président de la Douma, l’homme qui aura le plus aimé l’Empereur tout en restant fidèle à la cause du peuple, multiplia les avis. Toujours il fut repoussé. L’assassinat de Raspoutine, chez le prince Youssoupof, qui trouva des approbateurs jusque dans la famille impériale, prouvait assez que le mécontentement avait gagné toutes les classes. Le bruit courait d’une révolution de palais prochaine. La noblesse obligerait le souverain à abdiquer en faveur de son fils. J’étais alors à l’hôpital du Grand Palais. Je venais d’y être opérée sur les ordres bienveillants de l’impératrice. Ma convalescence s’achevait. À la veille de retourner à Pétrograd, j’allai rendre visite à l’une des dames d’hon-