Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/533

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lisette.

Ça ne se peut pas, monsieur de Lépaine ; ce n’est pas qu’ous ne soyais agriable ; mais mon rang me le défend, je vous en informe ; tout ce qui est comme vous n’est pas mon pareil, à ce que m’a dit ma maîtresse.

Lépine.

Ah ! ah ! me conseilles-tu d’ôter mon chapeau ?

Lisette.

Le chapeau et la familiarité itou.

Lépine.

Voilà pourtant un itou qui n’est pas de trop bonne maison ; mais une princesse peut avoir été mal élevée.

Lisette.

Bonne maison ! la nôtre était la meilleure de tout le village, et que trop bonne ; c’est ce qui nous a ruinés. En un mot comme en cent, je suis la fille d’un homme qui était, en son vivant, procureur fiscal du lieu et qui mourut l’an passé ; ce qui a fait que notre jeune dame, faute de fille de chambre, m’a prise depuis trois mois chez elle, en guise de compagnie.

Lépine.

Avec votre permission et la sienne, je remets mon chapeau.

Lisette.

À cause de quoi ?

Lépine.

Je sais bien ce que je fais, fiez-vous à moi. Je ne manque de respect ni au père ni aux enfants. Procureur fiscal, dites-vous ?