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Angélique.

Oui, Dorante, je vous le promets ; voilà qui est fini. Excusez tous deux l’embarras où se trouve une fille de mon âge, timide et vertueuse. Il y a tant de pièges dans la vie ! j’ai si peu d’expérience ! serait-il difficile de me tromper si on voulait ? Je n’ai que ma sagesse et mon innocence pour toute ressource, et quand on n’a que cela, on peut avoir peur ; mais me voilà bien rassurée. Il ne me reste plus qu’un chagrin. Que deviendra cet amour ? Je n’y vois que des sujets d’affliction. Savez-vous bien que ma mère me propose un époux que je verrai peut-être dans un quart d’heure ? Je ne vous disais pas tout ce qui m’agitait ; il m’était bien permis d’être fâcheuse, comme vous voyez.

Dorante.

Angélique, vous êtes toute mon espérance.

Lisette.

Mais si vous avouiez votre amour à cette mère qui vous aime tant, serait-elle inexorable ? Il n’y a qu’à supposer que vous avez connu monsieur à Paris, et qu’il y est.

Angélique.

Cela ne mènerait à rien, Lisette, à rien du tout ; je sais bien ce que je dis.

Dorante.

Vous consentirez donc d’être à un autre ?

Angélique.

Vous me faites trembler.