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Angélique.

Soit.

Lisette, à Dorante, à part.

Retirez-vous pour un moment.

Dorante.

Adieu, madame ; je vous quitte, puisque vous le voulez. Dans l’état où vous me jetez, la vie m’est à charge ; je pars pénétré d’une affliction mortelle, et je n’y résisterai point ; jamais on n’eut tant d’amour, tant de respect que j’en ai pour vous ; jamais on n’osa espérer moins de retour. Ce n’est pas votre indifférence qui m’accable, elle me rend justice ; j’en aurais soupiré toute ma vie sans m’en plaindre ; et ce n’était point à moi, ce n’est peut-être à personne à prétendre à votre cœur ; mais je pouvais espérer votre estime, je me croyais à l’abri du mépris, et ni ma passion ni mon caractère n’ont mérité les outrages que vous leur faites. (Il sort.)



Scène IV

ANGÉLIQUE, LISETTE, LUBIN.
Angélique.

Il est parti ?

Lisette.

Oui, madame.

Angélique, un moment sans parler, et à part.

J’ai été trop vite. Ma mère, avec toute son expérience, en a mal jugé ; Dorante est un honnête homme.

Lisette, à part.

Elle rêve, elle est triste ; cette querelle-ci ne nous fera point de tort.