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donner, que je ne veux confier à aucun de mes gens ; c’est d’observer Angélique dans ses promenades, et de me rendre compte de ce qui s’y passe. Je remarque depuis quelque temps qu’elle sort souvent à la même heure avec Lisette, et j’en voudrais savoir la raison.

Lubin.

Ça est fort raisonnable. Vous me baillez donc une charge d’espion ?

Madame Argante.

À peu près.

Lubin.

Je savons bian ce que c’est ; j’ons la pareille.

Madame Argante.

Toi ?

Lubin.

Oui, ça est lucratif ; mais c’est qu’ous venez un peu tard, noute maîtresse ; car je sis retenu pour vous espionner vous-même.

Madame Argante, à part.

Qu’entends-je ? (Haut.) Moi, Lubin ?

Lubin.

Vraiment oui. Quand Mlle Angélique parle en cachette à son amoureux, c’est moi qui regarde si vous ne venez pas.

Madame Argante.

Ceci est sérieux ; mais vous êtes bien hardi, Lubin, de vous charger d’une pareille commission.