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quatre-vingts ans, et cela avec la plus belle taille du monde.

Lisette.

Oh ! oui ; le plus souvent cela va comme cela peut.

La Marquise.

Eh bien ! tu vois, Lisette ; en bon français, il me dit que je ressemble à une vieille, que je suis contrefaite, que j’ai mauvaise façon ; et je ne m’en fâche pas, je l’en remercie. D’où vient ? c’est qu’il a raison et qu’il parle juste.

Dorante.

J’ai eu mille envies de vous dire comme aux enfants : Tenez-vous droite.

La Marquise.

Vous ferez fort bien. Je ne vous rendais pas justice, Dorante : et encore une fois il faut vous connaître. Je doutais même que vous m’aimassiez, et je résistais à mon penchant pour vous.

Dorante.

Ah ! marquise !

La Marquise.

Oui, j’y résistais ; mais j’ouvre les yeux, et tout à l’heure vous allez être vengé. Écoutez-moi, Lisette ; le notaire d’ici est actuellement dans mon cabinet qui m’arrange des papiers. Allez lui dire qu’il tienne tout prêt un contrat de mariage. (À Dorante.) Voulez-vous bien qu’il le remplisse de votre nom et du mien, Dorante ?

Dorante, lui baisant la main.

Vous me transportez, madame !