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Marton.

Ah ! madame, pourquoi m’avez-vous exposée au malheur de vous déplaire ? J’ai persécuté par ignorance l’homme du monde le plus aimable, qui vous aime plus qu’on n’a jamais aimé.

Araminte, à part.

Hélas !

Marton.

Et à qui je n’ai rien à reprocher ; car il vient de me parler. J’étais son ennemie, et je ne la suis plus. Il m’a tout dit. Il ne m’avait jamais vue ; c’est monsieur Remy qui m’a trompée, et j’excuse Dorante.

Araminte.

À la bonne heure.

Marton.

Pourquoi avez-vous eu la cruauté de m’abandonner au hasard d’aimer un homme qui n’est pas fait pour moi, qui est digne de vous, et que j’ai jeté dans une douleur dont je suis pénétrée ?

Araminte, d’un ton doux.

Tu l’aimais donc, Marton ?

Marton.

Laissons là mes sentiments. Rendez-moi votre amitié comme je l’avais, et je serai contente.

Araminte.

Ah ! je te la rends tout entière.

Marton, lui baisant la main.

Me voilà consolée.