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Dorante.

Non, je ne vois plus rien à tenter ; on nous quitte sans retour. Que nous étions mal assortis, marquise ! Eh ! pourquoi n’est-ce pas vous que j’aime ?

La Marquise.

Eh bien ! Dorante, tâchez de m’aimer.

Dorante.

Hélas ! je voudrais pouvoir y réussir.

La Marquise.

La réponse n’est pas flatteuse ; mais vous me la devez dans l’état où vous êtes.

Dorante.

Ah ! madame, je vous demande pardon ; je ne sais ce que je dis, je m’égare.

La Marquise.

Ne vous fatiguez pas à l’excuser, je m’y attendais.

Dorante.

Vous êtes aimable, sans doute ; il n’est pas difficile de le voir, et j’ai regretté cent fois de n’y avoir pas fait assez d’attention ; cent fois je me suis dit…

La Marquise.

Plus vous continuerez vos compliments, plus vous me direz d’injures ; car ce ne sont pas là des douceurs, au moins. Laissons cela, vous dis-je.

Dorante.

Je n’ai pourtant recours qu’à vous, marquise. Vous avez raison ; il faut que je vous aime ; il n’y a que ce moyen-là de punir la perfide que j’adore.

La Marquise.

Non, Dorante, je sais une manière de nous