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La Fée.

Oh ! non. Je veux lui parler ; mais éloignons-nous un peu pour feindre que nous arrivons.

(Elle s’éloigne de quelques pas.)
Arlequin se promène en chantant.

Ter li ta ta li ta.

La Fée.

Bonjour, Arlequin.

Arlequin, en tirant le pied, et mettant le mouchoir sous son bras.

Je suis votre très humble serviteur.

La Fée, à part à Trivelin.

Comment ! voilà des manières ! Il ne m’en a jamais tant dit depuis qu’il est ici.

Arlequin, à la Fée.

Madame, voulez-vous avoir la bonté de vouloir bien me dire comment on est quand on aime une personne ?

La Fée, charmée, à Trivelin.

Trivelin, entends-tu ? (À Arlequin.) Quand on aime, mon cher enfant, on souhaite toujours de voir les gens ; on ne peut se séparer d’eux ; on les perd de vue avec chagrin. Enfin on sent des transports, des impatiences et souvent des désirs.

Arlequin, en sautant d’aise et à part.

M’y voilà.

La Fée.

Est-ce que vous sentez tout ce que je dis là ?

Arlequin, d’un air indifférent.

Non, c’est une curiosité que j’ai.

Trivelin.

Il jase, vraiment !