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Le Chevalier.

Que cette amitié-là me serait d’un grand secours, s’il vivait encore !

La Marquise, pleurant.

Sur ce pied-là, nous l’avons donc perdu tous deux.

Le Chevalier.

Je crois que je ne lui survivrai pas longtemps.

La Marquise.

Non, chevalier, vivez pour me donner la satisfaction de voir son ami le regretter avec moi ; à la place de son amitié, je vous donne la mienne.

Le Chevalier.

Je vous la demande de tout mon cœur, elle sera ma ressource ; je prendrai la liberté de vous écrire, vous voudrez bien me répondre, et c’est une espérance consolante que j’emporte en partant.

La Marquise.

En vérité, chevalier, je souhaiterais que vous restassiez ; il n’y a qu’avec vous que ma douleur se verrait libre.

Le Chevalier.

Si je restais, je romprais avec tout le monde, et ne voudrais voir que vous.

La Marquise.

Mais effectivement, faites-vous bien de partir ? Consultez-vous : il me semble qu’il vous sera plus doux d’être moins éloigné d’Angélique.

Le Chevalier.

Il est vrai que je pourrais vous en parler quelquefois.

La Marquise.

Oui ; je vous plaindrais, du moins, et vous me