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du colons et du style contribuait encore à cette langueur. Cependant , quoique l’ouvrage n’eût pas attiré la foule , une partie du moins des spectateurs l’accueillit avec bienveillance Marivaux n’eut garde de faire en ce genre un nouvel essai de ses forces. Non-seulement il se rendait justice sur la vigueur tragique dont il était dépourvu ; mais , quelque peu favorable qu’il fût à la poésie , il ne pouvait se dissimuler la nécessité d’écrire la tragédie en vers pour ne pas courir, disait-il, même injustement, le risque d’une chute humiliante ; et il se sentait peu de talent pour la versification noble , élégante et harmonieuse , si nécessaire à ce genre d’ouvrage , quand l’auteur joint à l’ambition d’être applaudi au théâtre celle de l’être encore à la lecture , et de jouir, après une existence brillante et passagère , d’une existence solide et durable. »

Instruit par les deux expériences qu’il avait tentées à vingt-sept ans d’intervalle l’une de l’autre , Marivaux prit , comme on vient de le voir , le parti d’abandonner la scène tragique. Le public y a gagné doublement. Le temps que cet ingénieux écrivain eût perdu à composer de mauvaises tragédies a été utilement consacré à des ouvrages agréables, qui servent encore tous les jours à notre instruction ou a nos plaisirs.

Du reste, Marivaux est loin d’être le premier qui ait échoué contre le sujet de la Mort d'Annibal : sept auteurs, de Montreux en 1584, Scudéry en 1631, Desmarets en 1634, de Prades en 1649, Th. Corneille en 1669, Rioupéroux en 1688, le père Colonia eu 1697, s’étaient exercés sur le même sujet. De tous ces auteurs , il n’en est qu’un seul qui mérite d’être comparé à Marivaux ; il y a de grandes beautés dans l'Annibal de Th. Corneille ; mais, là comme dans l'Annibal de notre auteur , le sujet est affadi