Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/114

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par cette intrigue amoureuse , les grands intérêts politiques sont un peu sacrifiés. Tout cela est bien faux , bien mesquin , bien romanesque ; il est difficile de porter plus loin l’ignorance de l’histoire ainsi que l’oubli des mœurs romaines et des caractères de ses personnages ; cependant, qui le croirait ? de ces invraisemblances mêmes, Marivaux a trouvé le secret de tirer de temps en temps des situations intéressantes : cette Laodice, qui se sert de son autorité sur Flaminius pour tâcher d’en faire un défenseur de l’homme à qui elle a promis sa main , n’agit-elle pas, ne s’expriment- elle pas avec autant de force que de noblesse , lorsque , parlant du dessein qui a ramené Flaminius à Nicomédie , elle ne craint pas de lui dire :

Votre emploi dans ces lieux à ma gloire est funeste :

Ce héros qu’aujourd’hui vous demandez au roi.

Songez, Flaminius, songez qu’il eut ma foi;

Que de sa sûreté cette foi fut le gage;

Que vous m’insulteriez en lui faisant outrage.

Les droits qu’il eut sur moi sont transportes à vous ;

Mais enfin ce guerrier dut être mon époux.


Saurez donc ce héros ; ma main est à ce prix.

Il me semble que , dans les sentimens et dans le style , il y a là quelque chose de la manière de Corneille. Malheureusement , Marivaux ne soutient pas cet essor ; il retombe promptement, comme effrayé lui-même du vol qu’il a pris , et, à la différence de Corneille, il ne se relève qu’après un long repos. Corneille au contraire, comme indigné de sa chute, frappe du pied la terre qui l’a reçu, et qui ne semble ; pas digne de le porter, et un instant après, l’œil peut à peine le suivre dans les régions les plus élevées de l’intelligence et de la pensée.

La seconde scène du deuxième acte est la plus belle, ou ,