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naire que la manière dont il a été traité , dont il a été envisagé par Marivaux. En effet, c’est assurément une chose toute nouvelle , que d’entendre un vieux général dissertant à soixante-cinq ans sur l’influence de l’amour , et cela dans le moment où on s’attend à ne le voir occupé que de ses projets de vengeance contre les Romains ; dans le moment où, objet de leur constante inimitié, il est poursuivi par l’ambassadeur delà république jusque dans l’asile que la pitié et la reconnaissance lui ont ouvert. C’est dans cette position terrible qu’Annibal déclare à son confident que

Nous tenterions en vain d’empêcher que nos cœurs

D’un amour imprévu ne sentent les douceurs;

Ce sont là des hasards à qui l’âme est soumise,

Et dont on peut sans honte éprouver la surprise ;

Mais, quel qu’en soit l’attrait, ces douceurs ne sont rien,

Et ne font de progrès qu’autant qu’on le veut bien.


Laodice est aimable , et je ne pense pas

Qu’avec indifférence on pût voir ses appas.


Annibal a un rival , et , comme de raison , un rival préféré. Laodice, fille de Prusias , du roi de Bitliynie, trois ans auparavant, a vu Flaminius à la cour de son père, et de là une surprise de l’amour. Flaminius s’est enflammé aussi vite que la princesse , et , depuis son retour à Rome , il a fait confidence de sa flamme au sénat. Cet auguste corps s’est empressé de favoriser la passion de l’ambassadeur ; il a fait taire les lois ; il a accordé à Laodice des lettres de grande naturalisation ; sans s’en douter, elle est devenue Romaine , et une des instructions de Flaminius est de la demander pour épouse , afin de l’enlever plus sûrement à Annibal.

On conçoit facilement qu’au milieu des débats amenés