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de ses ouvrages. La tragédie d'Annibal était du moins exempte d’affectation et de néologisme. Si elle réussissait à la reprise, toutes les objections faites contre l’élection de Marivaux s’évanouissaient ; ses détracteurs et ceux de l’Académie étaient réduits au silence.

Malheureusement cette seconde épreuve ne fut pas beaucoup plus heureuse que la première ne l’avait été vingt-sept ans auparavant. La pièce n’eut que cinq représentations ; c’était bien peu , sans doute ; mais c’était beaucoup plus qu’en 1720 , si l’on fait attention que , dans l’intervalle des deux époques, les chefs-d’œuvre de Voltaire avaient dû rendre le public beaucoup plus difficile. D’un autre côté , Lanoue et Roselly avaient remplacé Baron et Dufresne dans les rôles d’Annibal et de Flaminius. C’était une demoiselle Gautier [1] qui avait succédé à la célèbre mademoiselle Desmares dans celui de Laodice. Le rôle seul de Prusias n’avait rien perdu : il fut joué d’abord par Legrand, et ensuite par Paulin, deux acteurs tragiques de la même force, et qui étaient goûtés l’un et l’autre dans la comédie. Il faut remarquer que, pendant très-longtemps , l’emploi des rois et celui des paysans étaient confiés au même acteur.

On doit avouer qu’indépendamment de ces circonstances, la tragédie d' Annibal. eu de la peine à se maintenir au théâtre. Ce n’est pas, comme le dit l’auteur, que le sujet en soit singulier ; il n’y a de bizarre et d’extraordi-

  1. Il ne faut pas confondre ; cette demoiselle Gautier, qui n’a point laissé de souvenirs au théâtre , avec une autre actrice du même nom, qui a dû quelque célébrité à la résolution qu’elle forma et qu'elle soutint de quitter la comédie pour se confiner dans un couvent de carmélites à Lyon, où elle mourut en 1757. Elle était retirée depuis 1723.