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LAI DE GRAELENT

trouverez guères de polis. La mélancolie du chevalier l’empêche de faire attention aux cris que faisoit naître la vétusté de son harnois. Il continue sa route, sort de la ville, entre dans la forêt qui étoit traversée par une rivière sur les bords de laquelle il se rendoit. Graelent marchoit depuis peu de temps dans le bois, lorsque, au milieu d’un épais buisson, il aperçut une biche plus blanche que la neige. La biche part, il la crie, la poursuit et il ne pourra pas l’atteindre, quoiqu’il la suive de près. Elle conduit Graelent dans une prairie arrosée par la source d’une fontaine dont l’eau étoit claire et belle. Au bord, se baignoit une jeune dame. Deux pucelles qui se tenoient près d’elle la servoient et exécutoient ses ordres. Les vêtements qu’elle avoit quittés étoient suspendus à un arbre. Dès que Graelent eut aperçu la beauté qui étoit dans la fontaine, il ne songe plus à poursuivre la biche. Il admire sa taille élancée, la blancheur de son teint, l’incarnat de ses joues, ses yeux riants, la beauté de son front, enfin cet assemblage de perfections qui se ren-