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LAI DU CHÈVREFEUILLE.

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J’aurai beaucoup de plaisir à raconter le Lai du Chèvrefeuille, mais je veux auparavant vous apprendre pourquoi il fut fait. Vous saurez donc que je l’ai entendu réciter plusieurs fois et que je l’ai même trouvé en écrit. Je parlerai de Tristan[1] de sa mie Yseult la blonde[2], de leur amour extrême qui leur causa tant de peines, et de leur mort qui eut lieu le même jour[3].

  1. Tristan de Léonois, chevalier de la table-ronde, étoit fils de Méliadus, roi de Léon, dans la petite Bretagne, et d’Ysabelle de Cornouailles. Le roman de Tristan est peut-être l’ouvrage le plus agréable de notre ancienne littérature. La traduction en prose françoise faite dans le xiie siècle est due à Luces du Gast, seigneur Normand, qui demeuroit à Salisbury. Le célèbre poëte Chrestien de Troyes, mit cet ouvrage en vers, et ce travail est malheureusement perdu. Deux autres poëtes Anglo-Normands, Thomas Rymer ou de Learmont et Thomas d’Ercildoune, l’ont également traduit en vers françois. M. Francis Douce, aussi connu par sa riche bibliothèque que par ses manières généreuses, possède un assez long fragment de cette version. Voy. Ritson, loc. cit., tom. III, p. 325. Tressan, Roman de Tristan ; Glossaire de la Langue Romane, tom. II, p 750 ; Etat de la Poésie Françoise dans les xiie et xiiie siècles, p. 145—153 et 471. M. Creuzé de Lessert, poëme des Chevaliers de la Table-Ronde, préface, etc.
  2. Yseult la Blonde, fille d’Argius, roi d’Irlande, et femme de Marc, roi de Cornouailles, oncle de Tristan. Elle fut surnommée la blonde pour ne pas la confondre avec Yseult aux blanches mains, fille de Houel, roi de la petite Bretagne, et femme de Tristan. La première avoit pour frère le chevalier le Morhoult, et la seconde, le chevalier Kéhédin.
  3. Voy. les Chevaliers de la Table Ronde, xxe chant.