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LAI DE MILON.


toujours une grande dépense[1]. Par-tout où il porta ses pas, le jeune chevalier remporta le prix de la valeur. Aussi la nouvelle de son courage, de sa courtoisie, de sa libéralité, et la réputation du héros se répandirent promptement. On apprit même dans son pays qu’un damoisel avoit passé la mer pour aller remporter le prix dans les tournois, et qu’il faisoit remarquer en lui toutes les qualités exigées dans l’homme revêtu de l’ordre sublime. Comme on ignoroit son origine, on l’avoit surnommé l’homme sans pareil.

Le bruit de ses exploits parvint aux oreilles de Milon ; il est fâché de trouver un brave plus brave que lui, et devient jaloux en pensant qu’un jeune chevalier pouvoit le surpasser. Il s’étonne que parmi les anciens aucun n’ait osé essayer ses forces contre le nouveau venu. Milon forme le projet de passer la mer et d’aller jouter contre le

  1. C’étoit après la bravoure, le plus grand éloge qu’on pouvoit faire d’un chevalier, que de dire qu’il étoit libéral ou généreux.