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opiniâtre contre une destinée qui jamais ne voulut dénouer de la vôtre son étreinte irritée, vous apparaissez aujourd’hui à tous comme la plus pure figure du stoïcisme accompli, poétiquement orné de grâce et d’une céleste élégance.

J’ai parlé de vous avec ceux qui vous ont connue.

Ils ont, dans le moment où leur mémoire et leur voix rappellent sur la terre votre belle ombre voilée, des intonations d’infinie tendresse. Que d’amour vous leur inspirez ! Au royaume sans écho, hélas ! peut-il vous parvenir ?

Sûre de votre rayonnant courage, vous aviez donné aux passions du cœur le rendez-vous de votre guérison ; vous étiez patiente, vous viviez dans la joie de l’esprit, dans la perpétuelle activité de la pensée de la logique, de la colère féconde, de l’espérance.

Privée du monde des sons, frustée de la parole aisée, portant sur l’univers et les visages votre clair regard où l’altération dessinée par la maladie irradiait comme un incertain soleil de l’aube, vous aviez assigné le terme de votre rééducation volontaire à l’échange d’un cœur avec votre cœur.

Mais si votre âpre destinée vous avait livrée au bonheur, cet éclat nouveau eût terni votre sombre et plus noble lumière. Jusqu’à l’achèvement de vos jours le sort se montra jaloux de votre solitude auguste, et rieusement tolérée. Vous mourûtes hâtivement, dans la plénitude de vos facultés reconquises, et l’on ne voit dans vos œuvres qu’un compagnon de