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LETTRES INÉDITES

LETTRES INÉDITES bre des morts et des prisonniers monstre bien de quel cousté Dieu a esté, et la force et vertu qu’il a myse en vos serviteurs’. Que si vous eussiez hazardé une bataille, où, encores que le gain eust esté vostre, si ne se feust il fait sans une perte de beaulcoup de gens de

bien, qui vous serviront à en gaigner d’aultres, si vos ennemis n’apprennent que la paix leur est plus proufitaible que

la guerre, et qu’il vault mieux estre receu honorablement dedans Paris vostre amy et frère’, que Marguerite se compare à Jacob apprenant que Joseph est vivant : Moy tout ainsy, après douleur mortelle Oyant de vous la très bonne nouvelle : Que mise à fin aviez vostre entreprise, Que Landrecy de l’Empereur n’est prise, Que vous aviez en despit de ses dents Davant ses yeux, tiré hors de dedans Vos bons soudarts, lenr faisant tant de biens Que tous leurs maux ils n’estiment plus riebs ; Que vous l’avez par moyens Jiligens Très bien garnie de vivres et de gens, Que conquereur revenez et vainqueur Accompagné de santé et d’bonneur, Dont ce seul bien, saus plus, me rent contente : Il me suffist ; en mieux p’ay ma preteute. De tous mes maux receus auparavant Je n’en sens plus, car mon Roy est vivant ! (Suyte des Marguerites, ép. a.)

  • Allusion à la défection du duc de Clèves. Marguerite avait cette

idée fixe que les ennemis de son frère étaient nécessairement haïs de Dieu. Elle s’en explique naïvement dans une épître en vers, où elle dit, en parlant du comte de Furstenberg : Ce que l’on voit par le comte Guillaume, Lequel servant le Roy et le royaume S’estoit fait riche et craint et estime, Mais mainteuant fuitif, pauvre et blasme,