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SUR MARGUERITE D’ANGOULÊME.

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aux écoles, non-seulement en France, mais aussi en Allemagne, » et non contente de stimuler les hommes d’étude par ces sacrifices d’argent, elle les encourageait par son propre exemple. A trentedeux ans, elle lisait Érasme dans l’original ; elle entendait Sophocle, et voulant approfondir le vrai sens de la Bible, le grec ne lui suffisant pas, elle prit des leçons d’hébreu de Paul Paradis, surnommé le Canosse, qu’elle fit plus tard nommer professeur au Collége de France. Et qu’on veuille bien songer que cela se passait presque à la même époque où cet axiome avait cours dans les écoles de droit : Græcum est, non legitur ; où les moines disaient au peuple dans leurs sermons : « On a trouvé depuis peu une nouvelle langue qu’on appelle grecque. Il faut s’en garantir avec soin : Cette langue enfante toutes les hérésies 1. » Et le célèbre théologien Claude d’Espence dit positivement qu’il suffisait de savoir épeler en grec ou en hébreu pour être déclaré hérétique. Voilà au sein de quelle barbarie une femme jeune et belle encore, une princesse du sang, une reine, donnait l’exemple d’une infatigable ardeur pour l’étude, d’un respect et d’une faveur illimitée pour

les érudits et les poëtes. Son esprit était assez fort, 1 GOUJET, Histoire du Collége de France, t. Ier.