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FARCE DES FILLES

A espérer bien par le Temps
Comme elle dict, rien n’y entends ;
Car l’amour, que trop fort je porte
A mon Mary, me rendra morte
Premier qu’aultre amour endurer,
Et me gardera de durer
Jusqu’au temps qu’elle me promect
Repoz, dont en peine me mect
Plus grande que[1] ne sentiz oncques.

La Vieille.

Si n’aurez vous repoz qu’adoncques.
On pourroict tel songe songer
Qui ne seroit mye mensonger ;
Le bon Docteur bien en parla[2].
Vrayment vous passerez par là
Toutes quatre, malgré vos dents,
Et moy, de peur des accidens,
Du serain m’en voys retirer.

La Première Femme.

Quoy, nous lairrez vous souspirer
Sans nous dire rien qui vaille ?

La Vieille.

Or appaisez vostre bataille ;
Je n’en puis plus porter le faix.

  1. Ms. : Plus grant que. — M.
  2. Est-ce une allusion au passage des Nombres, XII, 6 : « Dixit Dominus : … per somnium loquar ad illum », ou à celui des Machabées, II, xv, ii : « Exposito digno fide somnio, per quod universos (Machabæus) lætificavit » ? — M.