Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome III.djvu/228

Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
VIJe JOURNÉE

& vous ferez œuvre plus grande que d’aller oyr tout le service du jour. »

La Duchesse s’arresta voluntiers, sçachant que d’elle ne povoyt venir que tout bon conseil.

Perrette luy alla racompter incontinant comme elle avoyt prins une petite fille pour luy ayder à savonner le linge de la Royne, &, en luy demandant des nouvelles de la Ville, luy compta la peyne que les femmes de bien avoyent de veoir ainsi aller devant elle la femme de ce Chanoine, de laquelle luy compt une partie de sa vie.

Tout soubdain s’en alla la Duchesse à la Royne & à Madame la Régente leur compter ceste histoire, qui, sans autre forme de procès, envoièrent quérir ceste pauvre malheureuse, laquelle ne se cachoit poinct, car elle avoyt changé sa honte en gloire d’estre Dame de la maison d’un si riche homme, &, sans estre estonnée ny honteuse, se vint présenter devant les dictes Dames, lesquelles avoient si grande honte de sa hardiesse que soubdain elles ne luy sçeurent que dire. Mais après luy feyt Madame la Régente telles remonstrances qui deussent avoir faict pleurer une femme de bon entendement, ce que poinct ne feyt ceste pauvre femme, mais d’une audace très grande leur dist :

« Je vous supplie, mes Dames, que voulez garder