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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

Pas exactement ; au lieu d’une promesse écrite, c’est un ordre, adressé à la personne à qui le marchand envoie ses marchandises, par lequel il lui demande de payer, à une certaine date, une somme clairement énoncée dans la lettre, à une troisième personne qui y est nommée. Ainsi quand un marchand de draps en expédie en Portugal, il tire une lettre sur le marchand à qui il les consigne ; mais au lieu d’envoyer cette lettre avec ses draps en Portugal, il la négocie à Londres ; c’est-à-dire, qu’il cherche quelqu’un qui ait besoin d’une telle lettre pour acquitter une dette en Portugal. Il s’adresse donc à quelque marchand de vin, qui doit de l’argent à une maison de Lisbonne pour des vins importés de ce pays-là, et qui trouve commode de se servir de ce mode de paiement, pour éviter la dépense d’un envoi d’argent en Portugal. Il donne en conséquence au marchand de draps la valeur de sa lettre ; nomme son correspondant de Portugal comme étant la personne à qui la lettre est payable ; transmet la lettre à ce correspondant, qui va en recevoir la valeur chez celui sur qui elle est tirée.

CAROLINE.

La même lettre de change sert donc à payer l’une et l’autre marchandise, le drap et le vin ; et évite deux envois d’argent. C’est une invention commode et économique. J’ai bien envie d’en faire usage. J’ai une amie à York qui me doit quelque argent pour des emplettes que j’ai faites pour elle à Londres ; et ma sœur Émilie doit à peu près la même somme à un gantier d’York. Je pourrais donc tirer, sur mon amie, une lettre, que ma sœur m’achèterait, et qu’elle enverrait au gantier d’York pour acquitter sa dette ; et le gantier recevrait son argent de mon amie, sur qui j’aurais fait ma traite. C’est par de tels transports de créances, si je vous ai bien comprise, que les marchandises s’échangent entre commerçants.

MADAME B.

Je sais charmée que vous entendiez si bien l’usage des lettres de change. Vous voyez donc, que si, entre deux pays commerçants, la valeur des marchandises exportées égale celle des importées, la totalité des lettres de change remises de part et d’autre en paie-