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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

usage que l’on puisse faire de celles qui sont superflues est de les fondre et de les convertir en lingots.

MADAME B.

Mais fondre la monnaie est également, dans ce pays, prohibé par la loi. Si donc les lois n’étaient jamais violées, il y aurait nécessairement une quantité de monnaie superflue ajoutée à la circulation, et la valeur de la masse entière de la monnaie éprouverait une dépréciation.

Combien est différente la situation d’un pays où n’existent point de telles lois prohibitives ? Là, dès que la monnaie s’accumule au point d’être dépréciée, en d’autres termes, dès que toutes les marchandises augmentent de prix, les marchands exportent les espèces et les emploient à acheter des marchandises étrangères ; tandis qu’à leur tour les marchands étrangers s’empressent d’envoyer leurs marchandises dans le pays où elles se vendent à des prix élevés, et les échangent, non contre d’autres marchandises également chères, mais contre de la monnaie qui y est à bon marché.

CAROLINE.

C’est-à-dire, qu’ils vendent et n’achètent pas.

MADAME B.

Précisément : c’est ainsi qu’un pays se débarrasse de sa monnaie superflue. Ce commerce élève insensiblement la valeur de la monnaie ; le prix des marchandises baisse ; et les marchands étrangers échangent leurs marchandises contre celles du pays, au lieu de se faire payer en espèces.

Il n’y a pas lieu de craindre que cette liberté ait de fâcheuses suites, soit par la fonte des espèces, soit par leur exportation. Cette exportation aura lieu secrètement, dès qu’il y aura surabondance, quelle que soit la sévérité de la loi ; la seule différence qui en résulte est qu’au lieu de se faire ouvertement, et d’une manière régulière par des hommes d’un caractère respectable, elle se fera par des hommes méprisables, qui se laissent entraîner, par des profits extraordinaires, dans un trafic illicite.

Si l’Espagne et le Portugal, les deux pays qui reçoivent les métaux précieux importés d’Amérique en Europe, avaient pu réussir à