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J.-P. MARAT

cains, elles doivent inspirer la vertu, l’honneur dans les États monarchiques, la crainte dans les États despotiques.

Il n’est pas moins essentiel que le législateur ne choque jamais le principe du gouvernement. Les loix, dans la démocratie, doivent donc établir l’égalité et la frugalité, inspirer l’amour de la patrie, borner la fortune des citoyens, leur ôter tout espoir de s’enrichir, et ouvrir la porte aux dépenses publiques. Elles doivent même établir des magistrats pour avoir toujours les yeux ouverts sur le peuple, et veiller à la conservation des mœurs.

Dans l’aristocratie, les loix doivent tendre à inspirer aux membres du souverain un esprit de modération, à établir entr’eux l’égalité, et à leur donner ces vertus politiques, propres aux citoyens des démocraties. Ainsi attentives en tous tems à mortifier l’orgueil de la domination ; elles doivent détruire l’excessive inégalité entre ceux qui commandent et ceux qui obéissent, assujétir les premiers comme les derniers à supporter les charges de l’État, ne pas leur permettre de lever les impôts par leurs mains, leur interdire le commerce, en un mot leur ôter tout moyen de perpétuer la grandeur dans la même famille, terminer leurs différens avec célérité, et ne laisser dans l’État aucun azile contre la justice.

Dans les monarchies, les loix se rapportant à l’honneur, doivent rendre la noblesse héréditaire, soutenir les nobles, accorder des privilèges à leurs terres, établir la substitution de leurs biens ; et afin que le peuple puisse fournir au luxe du prince, de sa cour, favoriser le commerce et régler les impôts de manière à ne pas écraser le cultivateur, ni décourager l’industrie.

Le despotisme n’est propre qu’à dégrader et à sacrifier le genre humain. À l’égard des autres gouvernemens, ils ont chacun des avantages particuliers.

Le Républicain est plus propre aux petits États. Le