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Après avoir longuement analysé ses impressions, Camille s’avouait sans détour : « Un soir, en me faisant une légère violence, un monsieur m’a embrassée sur les lèvres. Cela m’a causé une sensation de surprise… qui n’avait rien de pénible. Je me la suis rappelée sans repentir. Et lorsqu’une femme se rappelle cela sans regret, elle est bien près d’en souhaiter le retour… Oui, c’est cette toute petite chose physique qui a produit mon désordre moral : ce désir d’aimer inoculé au cœur par un baiser. »

Elle songeait à la première bêtise de Simone et constatait, impartiale :

— Nous sommes bien toutes les mêmes… Car, moi aussi, je suis en train de m’éprendre d’un homme que je ne connais guère.

Elle corrigea, avec sa gaieté gamine :

— Cependant, je possède une supériorité sur ma sœur… Je flirte, mais je n’épouse pas !

Elle cherchait, en plaisantant, à surmonter le malaise qui la lancinait de plus en plus,