Page:Manuel d’Épictète, trad. Thurot, 1889.djvu.pdf/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XIII

Si tu veux faire des progrès, résigne-toi à passer pour un idiot et pour un imbécile dans les choses du dehors, consens à passer pour n’y rien entendre ; et si quelques-uns te croient quelque chose, défie-toi de toi-même. Sache qu’il n’est pas facile de conserver sa volonté dans un état conforme à la nature, et en même temps de veiller sur les choses du dehors ; mais nécessairement, on ne peut s’occuper de l’un sans négliger l’autre.

XIV

1. Si tu veux que tes enfants, ta femme, tes amis vivent toujours, tu es un imbécile ; tu veux que ce qui ne dépend pas de toi, dépende de toi ; tu veux que ce qui est à autrui soit à toi. Ainsi, si tu veux que ton esclave ne commette pas de fautes, tu es fou ; tu veux que le vice ne soit pas le vice, mais autre chose. Mais si tu veux ne pas manquer ce que tu désires, tu le peux ; applique-toi donc à ce que tu peux.

2. On est toujours le maître d’un homme, quand on a le pouvoir de lui donner ou de lui ôter ce qu’il veut ou ce qu’il ne veut pas. Si l’on veut être libre, qu’on n’ait ni désir ni aversion pour rien de ce qui dépend d’autrui ; sinon, il faut être esclave.