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tombe jamais dans ce qui est l’objet de son aversion[1], car il ne désire que ce qui est bon et il n’a d’aversion que pour ce qui est mauvais ; c’est ce qui dépend toujours de nous, puisque notre acquiescement dépend de nous et que nous restons les maîtres de juger bon ce qui tient de la vertu et mauvais ce qui tient du vice.

Or la vertu (ἀρετή) consiste précisément à juger bon ce qui est réellement bon et mauvais ce qui est réellement mauvais ; aussi est-elle une science, et elle est composée de maximes (θεωρήματα)[2]. Les quatre vertus principales sont des sciences[3] : la prudence (φρόνησις) est la science de ce qu’il faut faire ou ne pas faire et de ce qui est indifférent, la tempérance (σωφροσύνη) est la science de ce qu’il faut rechercher et éviter et de ce qui est indifférent, la justice (δικαιοσύνη) est la science de ce qu’il faut attribuer à chacun, le courage (ἀνδρεία) est la science de ce qui est à craindre et à ne pas craindre et de ce qui est indifférent[4] ; au contraire, le vice (κακία) est une ignorance, et les quatre vices opposés aux quatre vertus sont l’ignorance de ce qu’il faut faire ou ne pas faire, etc. Il est

  1. Manuel, ii, 1 ; xiv, 1.
  2. Cicéron, du Destin, VI, 11. Stobée, II, 110.
  3. Stobée, II, 92, 102 et suivants.
  4. Pour la définition des espèces de vertus, nous renvoyons au Lexique à αἰδήμων, ἐγκράτεια, καρτερία, κοινωνικόν, κόσμιος, μεγαλόφρων.