Page:Manuel d’Épictète, trad. Thurot, 1889.djvu.pdf/18

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tendant tout à coup un grand fracas, le philosophe ne peut s’empêcher de recevoir l’impression, ni même de changer de visage ; mais tandis que celui qui n’est pas philosophe acquiesce, tient l’idée pour conforme à la chose, c’est-à-dire pour redoutable, le philosophe, lui, n’acquiesce pas ; il conserve fermement sa manière de voir, il sait que l’impression reçue n’est qu’une vaine apparence qui n’a rien de réellement redoutable[1]. D’autre part les stoïciens, ou du moins Épictète admet, comme Platon, que l’homme ne se refuse jamais volontairement à reconnaitre la vérité, que l’homme vicieux ne voit pas le bien comme l’aveugle ne voit pas la lumière, et qu’il fait le mal non pas parce qu’il croit que c’est le mal, mais parce qu’il le prend pour le bien[2]. Cependant le principe que l’acquiescement dépend de nous est l’un des fondements de la morale stoïcienne[3].

Voici sur quels principes (κανόνες)[4] on doit régler son acquiescement.

Il n’y a de bon, d’autre bien (ἀγαθόν) que la

  1. Aulu-Gelle, Nuits attiques, XIX, 1, 15. Cicéron, Académiques, I, 14, 10 ; du Destin, XIX, 43.
  2. Discours, I, 18, 1-7 ; 28, 1-10 ; II, 26 ; III, 7, 15.
  3. Quant aux autres termes de logique qui se rencontrent incidemment dans le Manuel, nous les avons expliqués dans les notes ; nous renvoyons au lexique de l’édition grecque pour les textes sur lesquels nous nous sommes appuyés.
  4. Épictète, Discours, II, 11, 13 : III, 3, 15. Diogène, VII, 42.