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me ils s’affirmaient impérieux, ce furent de véritables hostilités qui s’engagèrent. Elles durèrent quelque temps, la jeune fille opposant à toutes les instances son inébranlable résolution de ne point se marier et la mère se bornant à transmettre cette réponse, après avoir rappelé la volonté du père.

Enfin, la malheureuse fiancée fut convoquée dans le cabinet du banquier, dans ce même cabinet où, une première fois, elle avait défendu Roland contre les hésitations de M. Sarmange. Mais, cette fois, elle sentait bien que, pour résister victorieusement, il lui manquerait l’argument décisif. Ce Roland, à qui elle avait accordé sa préférence, n’existait plus moralement et le banquier n’était pas homme à comprendre la fidélité au souvenir.

Violette entra donc, dolente et pâle, refoulant de grosses larmes. Elle se sentait faible et lasse.

Affectueusement, son père lui prit les mains et la fit asseoir.

— Je t’ai fait venir pour te parler raison, ma petite Violette.

— Oh ! père ! fit-elle, d’un air navré. Tu as déjà essayé jadis, et sans succès.

— Le destin s’est chargé de me prouver que j’aurais dû insister.

— C’est si cruel… si cruel… de me dire cela ! sanglota Violette.

— Tu ne peux cependant te condamner à un célibat perpétuel sous prétexte que tu as failli épouser… un fou.

— Oh ! père !

— Tu ne peux nous refuser, à ta mère et à moi, la joie de te voir mariée, la consolation de te savoir un protecteur.

— Puis-je oublier Roland… si vite ?

— Qui te demande de l’oublier ? Souviens-toi de lui comme d’un frère. Mais, accepte le mari que je veux te donner.

— Il me semble que ce serait trahir… dit Violette, les yeux baissés, la gorge pleine de sanglots.

Plus que jamais, elle ressentait douloureusement l’oppression de son secret. Mais, pou-