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n’ont point à rendre compte. Comment, dans ces conditions, parvenir, libre et vivant, jusqu’à l’homme, si le hasard s’en mêlait ?

Quant à dévoiler le secret de sa fantastique aventure et à réclamer les secours de la police et de la loi, il n’y fallait pas songer. Invoquer le témoignage du professeur Fringue pour le cabanon.

Seul ! le gorille était seul contre un adversaire inconnu, que soutiendraient, au premier appel, toutes les forces de la société. Il n’était qu’une bête chassant l’homme en pleine civilisation.

Mathématiquement, il devait succomber. Pourtant, il ne renonça pas. Il est vrai qu’à ses yeux, sa vie était un bien faible enjeu, mise en regard de sa vengeance. Il attendit donc et se recueillit, avant d’adopter une tactique nouvelle.

Une prudence instinctive lui avait fait, dès le début de ses recherches, abandonner l’ancien domicile de Godolphin. Tous deux, déménageant nuitamment, avaient transporté leurs pénates dans Paris. Les environs de la Glacière, avec leurs masures isolées, offrirent le gîte sûr que souhaitait Roland.

Or, un beau matin, sans qu’aucun incident justifiât ce renouveau de curiosité, un journal recommença à parler du singe phénomène. « Le filet » se détachait en bonne place, et fut reproduit avec des variantes.

« Qu’est devenu le fameux gorille, demanda en chœur la presse du matin et du soir. Puis, ce furent des insinuations : son escapade en avait fait un danger public ; l’autorité ne pouvait s’en désintéresser ; la police devait aux citoyens de découvrir, son propriétaire et de s’assurer que la bête était suffisamment surveillée. Des avis suivirent, qui promettaient des primes à qui apporterait un renseignement, soit aux journaux, soit à la police. Enfin, un dernier communiqué, d’allure officielle celui-là, invitait le sieur Godolphin ; dernier « manager » de la bête