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— Rien d’anormal, sauf…

— Sauf… parfaitement… sauf la chose elle-même… C’est merveilleux !… Ah ! mon… monsieur… la science a fait un grand pas !… un pas énorme !…

Le gorille ne semblait point comprendre. Il regardait alternativement les deux médecins et s’étonnait autant des phrases de l’un que des mimiques de l’autre. Car, à la façon des muets, le docteur Silence répondait aux exclamations du professeur par une série de gestes et de grimaces qu’il exécutait avec une rapidité déconcertante.

L’homme-singe dévisagea silencieusement ses interlocuteurs pendant quelques secondes ; puis il se décida :

— Je suis venu, dit-il. Vous savez qui m’envoie ?

— Oui, dit Fringue, en s’agitant soudain dans son fauteuil. Est-il possible que…

— Lequel de vous est le professeur Fringue ?

— C’est moi, répondit le savant. Ne me reconnaissez-vous pas, vraiment ? demanda-t-il avec inquiétude.

— Non…

— Non ?

— Je ne vous ai jamais vu, déclara le gorille.

— Jamais !

Ces mots parurent jeter le professeur dans une évidente consternation.

Il se tourna vers le docteur Silence.

— Voici une lacune extraordinaire, murmura-t-il d’un ton perplexe.

Les lèvres du disciple esquissèrent — à peine — une ombre de sourire.

— Vous devez m’expliquer… reprit le gorille.

— Oui, coupa le chirurgien, nous vous expliquerons. Nous tâcherons de vous expliquer… Ce n’est pas impossible, n’est-ce pas docteur Clodomir ?… On peut imaginer une lésion accidentelle… ou plutôt une compression… hé ?… oui, c’est cela, une compression… la présence d’un caillot de sang obstruant la circulation… En fait, quelques cel-