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lette. Ouvre la cage. Nous ne discuterons pas la rançon.

Elle tendit une liasse de billets de banque qu’elle venait de tirer de son sac-à-main.

Un peu consolé, Godolphin les prit sans se faire prier. Néanmoins, il soupira en décadenassant la porte de la cage.

— Vous ne marchandez pas, la petite dame. Mais, voyez-vous, ça n’a pas de prix un phénomène pareil… Enfin, à votre convenance, puisque le bougre s’en mêle. Ce n’est plus le maître qui décide. Mais, quoi ? Au jour d’aujourd’hui, je ne peux plus m’étonner de rien. Les bêtes parlent et raisonnent comme les gens.

Tout en marmottant son monologue, plus pour lui que pour ses auditeurs, il avait ouvert la cage.

Le gorille sortit.

— Libre ! s’écria la jeune fille.

— Merci. Violette ! dit-il avec émotion.

Machinalement, sa main avait esquissé un geste vers elle ; mais il s’arrêta, honteux et triste. Ce fut la jeune fille qui, saisie de pitié pour sa souffrance, prit la grosse patte velue et la serra dans ses menottes.

— Courage, Roland ! murmura-t-elle. Allez sans tarder trouver le savant dont je vous ai parlé… le professeur Fringue… J’ignore ce qu’il vous dira ; mais, il s’est fait fort de vous expliquer ce mystère. Voici son adresse.

Le gorille prit le carton.

— J’irai, dit-il… Oh ! savoir ! savoir !

La tête, basse, les yeux à terre, il suivit quelques instants sa pensée intérieure, tenant toujours la main de la jeune fille. Quand il la releva, beaucoup de mélancolie se lisait encore dans son regard, mais en même temps le feu sombre d’une inébranlable résolution y brillait.

— Adieu, petite fleur ! dit-il.

Il se dirigeait vers la porte de la grange.

Un cri de Godolphin l’arrêta.

— Vous allez ! s’exclama le saltimbanque, qui n’osa plus tutoyer son gorille. Tout de