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Il courait, emporté par le puissant effort de ses courts jarrets, un souffle rauque grondant dans sa poitrine ; ses yeux fouillaient l’ombre, jetant des lueurs menaçantes, défiant l’obstacle.

Il faisait nuit. Rien ne s’opposait à sa course et il n’y avait pas de passants pour s’en étonner. Qui, d’ailleurs, eût osé tenter de l’arrêter, en voyant l’expression de farouche résolution empreinte sur son visage ?

Il sortit de Paris, sans ralentir sa course, traversa la banlieue, s’arrêtant au croisement des routes pour déchiffrer les indications des écriteaux, puis repartant de la même allure effrénée.

Le jour vint. Des gens l’aperçurent et s’effacèrent. Après son passage, bien qu’il n’eût pas semblé prendre garde à eux, les groupes se formaient, s’inquiétaient, ameutaient d’autres curieux.

Vers neuf heures, après la lecture des journaux, ce fut pire. On sut qu’un singe, d’une force herculéenne s’était échappé des Folies-Olympiques, pris d’une véritable crise de folie furieuse.

On se demanda :

— Est-ce lui ?

De proche en proche, les alarmistes répandirent la nouvelle :

— Le gorille ! Avez-vous vu le gorille ? Il est dans la région.

La panique se déchaîna. Partout, on se barricadait, tandis que des hommes, armés de fusils et de bâtons, se lançaient à la poursuite de la bête.

Insouciant, le gorille courait toujours, coupant à travers bois, disparaissant aux yeux des poursuivants pour reparaître à une lieue de là, semant partout la terreur et partout signalé.