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OÙ PROCOPE REPARAÎT



Non… c’est-à-dire presque !… s’écria l’interpellé. Mais j’ai vu Procope…

— Procope ? s’enquit anxieusement Charles.

— Oui, Procope !… Et je l’ai pour- suivi et, il m’a fourré dedans… Il est ici, il va trouver le trésor… et toi, Charles, tu ne l’auras pas ! »

La figure d’Arthur exprimait le plus violent désespoir.

« Mon enfant, dit alors Mme Saint-Paul, calmez-vous. Ne prenez pas les choses tragiquement ; si Charles ne mettait pas la main sur le trésor… eh bien… il s’en consolerait, voilà tout. Mais je vous félicite pour la vivacité de votre amitié. Voyons, prenez votre place…

— C’est que je ne puis dîner avec mes mains sales.

— Dépêchez-vous ! Dépêchez-vous | On veut savoir l’histoire de Procope. »

Arthur sortit et revint au bout de quelques instants ; il n’avait pris que le temps de se laver un peu la figure et les mains. Dès qu’il rentra, tous les enfants crièrent :

« Vite ! vite ! l’histoire !

« Eh bien, voilà, commença Arthur. À peine avais-je quitté Charles que je regrettais de ne pas l’avoir accompagné, parce que le chemin me parut moins agréable qu’à l’aller. Enfin, je retrouvai le paquet de gâteaux ; je me mis en devoir de les déguster.

« Je n’avais englouti qu’un éclair, un baba et une « religieuse » quand, à un tournant de chemin, apparurent un voyageur et deux jeunes gens qui poussaient leurs bicyclettes devant eux. Au premier coup d’œil, je reconnus Procope. Je me levai, me mis en travers du chemin et m’écriai : « Monsieur Procope ! Monsieur Procope ! C’est vous ! » Aussitôt, il s’avance vers moi et m’envoie un croc-en-jambe qui me fait rouler par terre… »

Un cri d’indignation, poussé par l’auditoire, interrompit le récit d’Arthur.

« Attendez ; en m’étalant, j’écrase les gâteaux qui restaient et j’ai une rapide vision de crème au chocolat mélangée par terre avec du rhum, des fruits, du sirop… et de la poussière. »

M. Tourneur, Mme Saint-Paul, Paul Dambert, Mlle Marlvin se mirent à rire ; mais Charles, Colette et Paul ne souriaient pas.

« Alors ? dit Colette.

— Je bondis sur ma bicyclette pour rattraper Procope qui détalait à toute vitesse avec ses élèves. « Ho là ! criai-je. Arrêtez-vous ! » Plus je criais, plus ils filaient… et j’étais furieux. Alors je pédalais, pédalais… Bon ! Nous voilà sur une grande route, cela allait mieux pour moi, mais pour eux aussi naturellement… Je gagnais du terrain, un des garçons perdait de son assurance et commençait même à faire quelques zigzags. Procope se retournait et criait : « Va donc ! Va donc, Gaston. » Et Gaston faisait tous ses efforts, mais en vain. Je fus bientôt à quelques mètres d’eux. « Monsieur Procope, criai-je, je vous somme de vous arrêter… » Pas de réponse. « Monsieur Procope, votre conduite est indigne ! Pourquoi ce croc-en-jambe ? » À ce moment une corne d’automobile retentit. Nous étions tous les quatre au beau milieu de la route. En cet endroit, elle fait une légère courbe. Je donne un bon coup de pédale pour essayer de « couper » Procope et… je me trouve nez à nez avec lui… Nous nous heurtons. Un choc. Et nous voilà tous les deux dans le fossé.

« Ah ! m’exclamai-je, tandis que je tâtais mes membres en me relevant, vous êtes bien forcé maintenant de vous arrêter ! » Je ne pouvais mieux dire, car il s’était fait une entorse.

— Bien fait ! s’écria Colette haletante.

« Alors, le voilà qui se met à hurler et à m’accabler d’injures. « Oui, vous cherchez le trésor de M. Toupie… Vous me suivez depuis la Bretagne, vous m’espionnez, car vous savez que je connais la cachette du trésor.

« — Je sais que vous connaissez la cachette ? m’écriai-je, stupéfait, Mais nous n’avons jamais entendu parler de