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LE TRÉSOR DE M. TOUPIE

Lorsqu’il eut terminé, Louis demanda :

« Alors, comment vas-tu t’y prendre ?

— J’y ai réfléchi… pas encore beaucoup… mais il me semble que le mieux serait de prendre successivement les guides de toute la France, province par province, de les lire avec soin et de savoir d’abord quelles sont les statues de la Vierge élevées sur des rochers.

— Parfaitement, c’est un travail éliminatoire.

— Ensuite, continua Charles en se promenant de long en large dans la pièce, dans les guides je verrai si, près de ces statues de Vierge, il y a d’anciennes cathédrales, de vieilles maisons, des ruines ; et si un endroit me semble répondre aux données du concours, eh bien ! nous nous dirigerons vers cet endroit.

— Ton plan me semble assez bon, dit le jeune docteur… Mais il est bien entendu que tes études ne souffriront pas de tes recherches ? D’ici la mi-juillet tu as deux bons mois devant toi, puisque nous sommes le 10 mai ; tu peux concilier ton travail et tes projets.

— Tu ne me demandes pas ce que je ferai du trésor si je le trouve ? dit Charles.

— Oh ! ça… On a toujours l’emploi d’une somme d’argent, lorsqu’on est, comme nous, sans fortune. En tout cas, j’espère que tu le mettras de côté… pour plus tard.

— Eh bien ! pas du tout, mon vieux, tu es dans l’erreur la plus profonde. Si je trouve le trésor de M. Toupie, je te le donne ; nous quittons Versailles, nous nous installons à Paris : toi qui as toujours regretté d’être obligé de t’établir sitôt ton diplôme conquis et de ne pas pouvoir poursuivre des recherches scientifiques, tu travailles pour toi, moi pour moi, et voilà !

— Hum ! Hum ! s’écria Louis, plus ému qu’il ne voulait le laisser paraître de la pensée de son frère ; nous verrons. En attendant le jour problématique où nous mettrons la main sur le trésor, je vais terminer un petit travail, et toi ?

— Moi, je vais écrire un mot à Élisabeth pour lui raconter ces événements sensationnels. »

Élisabeth Tourneur était une fillette de douze ans dont le père, professeur au lycée du Puy, avait été un grand ami du père des jeunes Lefrançois ; leurs enfants étaient liés par la même amitié. M. Tourneur avait perdu sa femme l’année précédente. Élisabeth, sa fille aînée, s’occupait de la maison, de deux frères et d’une petite sœur. La perte de sa mère avait été une grande douleur pour elle, mais elle s’efforçait de la dissimuler à son père qui avait passé de longs mois dans le désespoir.

Il avait été nommé au Puy au mois d’octobre précédent ; l’éloignement était chose pénible pour les Lefrançois comme pour les Tourneur. Mais les uns et les autres avaient l’habitude de s’écrire souvent, de se revoir pendant les vacances, et jamais une semaine ne s’était passée sans que les deux familles n’eussent échangé des nouvelles. C’est ce qui explique le désir qu’avait Charles de connaître l’opinion d’Élisabeth au sujet du concours de M. Toupie.


charles se mit au travail.

Mais la lettre de Charles ne fut pas écrite ce jour-là. Il avait ouvert sa bibliothèque pour chercher les guides qu’il possédait : étant tombé sur celui de Normandie, il s’était mis à le feuilleter, et l’heure du coucher sonna sans qu’il eût commencé sa correspondance.

Mais le lendemain dimanche, Charles écrivit ces lignes à son amie :

« Ma chère Élisabeth. Un mot pour te dire de lire le Coq gaulois du 9.