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chait à se constituer sur les débris de la féodalité. Après quelques incertitudes déterminées par ses liens de famille dans le parti de la Fronde, et par son amour pour la duchesse de Longueville, Turenne se déclara pour la cour, et prit le commandement des armées contre les princes et contre Condé..

Turenne, dans cette campagne de 1652, déploya toutes les ressources de son génie militaire, vainquit ses ennemis, obligea Condé à sortir de France, consolida la monarchie qui se substituait de plus en plus à la noblesse, et assura enfin la couronne sur la tête de Louis XIV.

Cette victoire donna un immense crédit à Turenne, et lui valut sans partage le commandement des armées.

En 1654, il recommença la guerre contre les Espagnols, qui ne fut terminée qu’en 1659, par le traité de paix des Pyrénées, qui valut à la France de grandes conquêtes.

Alors Turenne prit un repos qu’il ne connaissait pas depuis trente ans. C’est vers cette époque qu’il étudia le catholicisme. Bossuet, pour le convertir, composa son Exposition de la foi, et il abjura entre les mains de l’archevêque de Paris, le 25 octobre 1668. En 1672, il fit la campagne de Hollande, célèbre par les ravages et l’incendie du Palatinat ; en 1674, avec des forces très inégales, il battit les troupes de la Hollande, de l’Empire et de l’électeur de Brandebourg. Après tant de victoires, Turenne voulait aller passer le reste de ses jours chez les Pères de l’Oratoire, lorsque, sur les instances de Louis XIV, il reprit, en 1675, le commandement des armées. Il se trouvait en présence de l’illustre tacticien, comte de Montecuculli ; il avait réussi à l’amener sur un terrain favorable ; déjà il s’écriait : « Je le tiens : il ne pourra plus m’échapper, lorsqu’un boulet, tiré au hasard, vint le frapper au milieu de l’estomac, le 27 juillet 1675.


(Turenne,)


Le même coup emporta le bras du général Saint-Hilaire, et son fils fondait en larmes : « Ce n’est pas moi qu’il faut pleurer, dit celui-ci en montrant le corps de Turenne ; c’est ce grand homme. »

Madame de Sévigné, dans une éloquente lettre, a raconté l’effet douloureux que cette mort produisit en France. On ne doit voir toutefois dans Turenne qu’un des grands capitaines des temps modernes, distingué par sa prudence, ses calculs savans, son sang-froid et sa bravoure. Il a eu la gloire de donner à Louis XIV son trône, et de garantir la France de plusieurs invasions étrangères.


(Équipement d’un cavalier français dans le XVIIe siècle.)


DES CHEVAUX ARABES.

Le mot collectif par lequel les Arabes désignent les chevaux en général est khayl. Ils les divisent en cinq grandes races originaires du Nejed, et, de temps immémorial, ils ont mis un soin religieux à conserver la pureté de ces races. Quelques auteurs font remonter leur origine à la période la plus éloignée du paganisme, assignant, comme le père commun, un coursier fameux, nommé Mashoor, appartenant à un ancien chef d’une de leurs tribus ; d’autres assurent qu’elles sont issues des cinq jumens favorites du Prophète. Quoi qu’il en soit, elles n’ont pas de marques caractéristiques qui puissent les distinguer les unes des autres. On ne les reconnaît qu’au moyen des certificats de leur généalogie, tirés et attestés par les propriétaires, et dans lesquels l’origine masculine et féminine est spécifiée avec une grande exactitude. Tout cheval arabe mis en vente est habituellement pourvu de ses titres de noblesse.

L’affection fraternelle, la prédilection décidée que les Arabes portent à leurs montures, sont fondées non seulement sur l’utilité qu’ils en retirent dans leur vie active et vagabonde, mais encore sur une ancienne croyance qui doue les chevaux de sentimens nobles et généreux, d’une intelligence supérieure à celle des autres animaux. Ils disent ordinairement : « Le cheval est la plus belle créature après l’homme ; la plus noble occupation est de l’élever, le plus délicieux amusement de le monter, et la meilleure action domestique de le soigner. » Ils ajoutent, d’après leur prophète : « Autant de grains d’orge donnés au cheval, autant d’indulgences gagnées. »

Mahomet décrit ainsi la création du cheval : « Dieu appela le vent du sud, et dit : — Je veux tirer de toi un nouvel être ; condense-toi, dépose ta fluidité, et revêts une forme visible. Ayant été obéi, il prit quelque peu de cet élément devenu palpable, souffla dessus, et le cheval fut produit. — Va, cours dans la plaine, dit alors le Créateur à l’animal ; tu deviendras pour l’homme une source de bonheur et de richesse ; la gloire de te dompter ajoutera à l’éclat des travaux qui lui sont réservés. »

Les chevaux arabes sont en général, d’une constitution délicate, mais accoutumés aux fatigues des longues mar-