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(Nicolas Poussin.)

Antonio del Pozzo, archevêque de Pise, et frère du chevalier Cassiano del Pozzo, son protecteur et son ami :

« Je fus conduit le soir dans l’appartement que M. Desnoyers m’avait destiné. C’est un petit palais, car il faut l’appeler ainsi. Il est situé au milieu du jardin des Tuileries. Il est composé de neuf pièces à trois étages, sans les appartemens d’en bas, qui sont séparés : ils consistent en une cuisine, la loge du portier, une écurie, une serre pour l’hiver, et plusieurs autres petits endroits où l’on peut placer mille choses nécessaires. Il y a, en outre, un beau et grand jardin, rempli d’arbres à fruits, avec une grande quantité de fleurs, d’herbes et de légumes ; trois petites fontaines, un puits, une belle cour, dans laquelle il y a quelques arbres fruitiers. J’ai des points de vue de tous côtés, et je crois que c’est un paradis pendant l’été. En entrant dans ce lieu, je trouvai le premier étage rangé et meublé noblement, avec toutes les provisions dont on a besoin, même jusqu’à du bois et un tonneau de bon vin vieux de deux ans. J’ai été fort bien traité pendant trois jours, avec mes amis, aux dépens du roi. Le jour suivant je fus conduit par M. Desnoyers chez le cardinal de Richelieu, lequel, avec une bonté extraordinaire, m’embrassa, et, me prenant par la main, me témoigna d’avoir un grand plaisir de me voir. »

Bientôt après, Louis XIII lui accorda le brevet de son premier peintre ordinaire, avec 3 000 livres de gages, dit le brevet, et l’usage de cette même maison du milieu du jardin des Tuileries, où Menou avait demeuré auparavant.

Mais Poussin languissait loin de Rome ; il voyait d’ailleurs partout des envieux. Une circonstance vint mettre le comble à ses chagrins. Lemercier, architecte du roi, avait commencé à faire travailler à la belle galerie du Louvre ; Poussin fit changer dans la voûte les compartimens, comme trop massifs et trop pesans pour ses dessins ; Lemercier s’en offensa, et les peintres mécontens se joignirent à lui contre Poussin, qui demanda à retourner à Rome pour chercher sa femme et mettre ordre à ses affaires. Il obtint un congé. Peu après le cardinal de Richelieu mourut, le roi suivit de près son premier ministre ; M. Desnoyers se relira de la cour, et Poussin resta en Italie, suivant son désir.

Le travail, la maladie avaient épuisé ses forces : il expira le 19 novembre 1665, âgé de soixante-onze ans.

Cette année-là même, il écrivit encore des lettres où il jeta, avec une grande simplicité, çà et là, les réflexions les plus justes et les plus élevées sur l’art.

La France possède, dans son musée du Louvre, trente-neuf tableaux de Poussin, qui sont numérotés, depuis 196 jusqu’au no 235, dans le catalogue de 1832. Les dessins que l’on a conservés sont au nombre de vingt-deux. Entre les plus remarquables de ses tableaux sont les bergers d’Arcadie, et le déluge.

Nous avons de Poussin un recueil de lettres qui a paru en 1824.

On y trouve le passage suivant qu’il écrivait dans l’année de sa mort à M. de Chambrai : « Définition : la peinture est une imitation faite avec lignes et couleurs, en quelque superficie, de tout ce qui se voit sous le soleil. Sa fin est la délectation. Il ne se donne point de visible sans lumière, sans forme, sans couleur, sans distance, sans instrument. Pour ce qui est de la matière (ou sujet), elle doit être noble ; et pour donner lieu au peintre de montrer son esprit, il faut la prendre capable de recevoir la plus excellente forme. Il faut commencer par la disposition, puis par l’ornement, le décor, la beauté, la grâce, la vivacité, le costume, la vraisemblance et le jugement partout ; ces dernières parties sont du peintre, et ne peuvent s’enseigner. C’est le rameau d’or de Virgile, que nul ne peut cueillir s’il n’est conduit par le destin. »

On prétendait qu’il avait aussi composé un Traité des lumières et des ombres ; mais Du Ghet, son beau-frère, dans une lettre à M. de Chantelou, prouve que ce n’est qu’un extrait de Matteo, auteur italien, que lui-même avait fait pour l’usage de Poussin.




GROTTE BASALTIQUE DE L’ÎLE DE STAFFA, EN ÉCOSSE.

(Vue de l’île de Staffa.)


Staffa est l’une des îles Hébrides ; elle est située par le 57e degré de latitude nord, à quinze milles de l’île de Mull.

On assure que Joseph Banks, célèbre compagnon de Cook, est le premier naturaliste qui ail abordé cette île (août 1772), et en ait donné la description. M. Panckoucke l’a visitée il y a peu d’années, et a publié, en 1831, une relation de son voyage, où nous trouvons les détails les plus curieux et les plus intéressans que nous puissions offrir à nos lecteurs.

Le nom celtique de la grotte de l’île de Staffa est An-Ua-Vine ou Fine. Staffa est un terme norse, qui veut dire bâtons ou colonnes : an-ua-vine ou fine signifie la grotte